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Faut-il dormir loin des objets connectés ?

le 21/04/2017

Qu'appelle-t-on objets connectés ?
Docteur Thibaut Gentina :
Les plus communs sont bien sûr nos Smartphones et ordinateurs. On y ajoute désormais un florilège de nouvelles applications, Wearable et traqueurs d’activité, parfois dotées d’accessoires, montres, bracelets, capteurs. Ces applications souvent destinées au bien-être et à la santé ont pour fonction de recueillir et d’analyser les données biométriques d’une personne : l’activité physique, le temps de sommeil... Je complèterais par les Smart home, qui analysent les paramètres environnementaux d’une pièce, par exemple, pour moduler l’éclairage, la température, à des fins de confort, d’endormissement…

Etes-vous sceptique face à la multiplication d’objets et de technologies qui sont parfois spécifiques au sommeil ?
TG :
Je n’y suis pas très favorable, mais je ne fermerais pas la porte à tous ces objets. Certains sont utilisés, sous contrôle médical, pour accompagner le traitement des apnées du sommeil. Les Wearables et traqueurs d’activité peuvent s’avérer utiles pour sensibiliser une personne à son hygiène de vie, à son activité physique, à ses rythmes de sommeil, mais seulement sur une période d’une semaine à un mois. Je reste critique sur la fiabilité de leurs données qui n’est pas toujours établie. J’alerterais sur les risques à recourir toujours plus à ces objets. Trop de Français dorment déjà avec leur Smartphone et leur ordinateur qui perturbent le rythme du sommeil par leurs lumières.

Comment des lumières d’écrans influent-elles sur le sommeil ?
TG :
Les écrans de Smartphone, d’ordinateurs, de tablettes, de téléviseurs à LED diffusent une lumière bleue froide, les ondes bleues du spectre de la lumière, qui retarde la sécrétion de mélatonine, l’hormone du sommeil. Deux heures d’iPad font chuter de 20 % le taux de mélatonine ; utiliser un écran dans son lit décale l’endormissement. Une lumière même fugace de portable la nuit fragmente le sommeil.

Un sommeil perturbé peut-il avoir des conséquences sur la santé ?
TG :
Un rythme biologique perturbé occasionne une dette de sommeil, dont l’accumulation peut altérer notre santé. Chez l’adulte, le besoin moyen de sommeil est estimé à 7h30/ 8h. Dormir moins de 5 heures par nuit sur une période de six mois et plus, expose à des complications cardiovasculaires, au diabète, à des douleurs articulaires, à des troubles dépressifs, digestifs. Ce n’est donc pas anodin !

Au centre du sommeil, êtes-vous confronté à ces questions de dette de sommeil et de nouvelles technologies ?
TG :
De plus en plus de patients viennent nous consulter pour des problèmes de fatigue et de somnolence. Ils sont la conséquence de la dette de sommeil qui est aujourd’hui la pathologie la plus fréquente sur ce sujet. La somnolence ou la fatigue ne sont pas des maladies, mais elles sont liées à des problèmes d’hygiène de vie et d’absence de discipline, notamment face aux écrans. Plutôt que d’amplifier les sources de pollution technologique, il serait préférable de réviser nos modes de vie. Il s'agit de prendre de la distance et de se séparer de ces objets au-delà d’une certaine heure. Certaines populations sont plus exposées comme les jeunes adultes et les adolescents, qui grandissent dans cet environnement technologique, mais ne viennent pas encore nous voir.

Quelques chiffres

L'utilisation d’écrans le soir renforce les troubles du sommeil et la somnolence

• 4 Français sur 10 utilisent ordinateur, tablette, Smartphone le soir dans leur lit

• 3 Français sur 10 regardent la télévision le soir dans leur lit

• 52 % gardent leur téléphone mobile dans leur chambre

• 10 % peuvent être réveillés la nuit par des messages

• 92 %  consultent leus messages dès réception, 79 % répondent

• 49 % des Français qui ont un ordinateur dans leur chambre présentent des troubles du sommeil, contre 36 % de la population française

• 27 % des 18-24 ans, qui utilisent les outils électroniques le soir somnolent durant la journée, contre 9 % des non-utilisateurs

(Source : enquête INVS 2016)